Bohême et Moravie: marcophilie

Le 15 mars 1939, l’armée allemande occupe la moitié ouest de la Tchécoslovaquie. Le lendemain, le protectorat de Bohême et Moravie (capitale Prague) est créé, et la Slovaquie (partie est de l’ex Tchécoslovaquie) proclame son indépendance.

La carte ci dessous, au verso de l’entier allemand P  279 (catalogue Michel) représente la région des Sudètes, annexée en octobre 1938 (en beige) ainsi que la Bohême et Moravie (partie avec une photo).

1 La poste civile (Protektoratspost)

Avec l’occupation et la création du protectorat, c’est la Reichpost qui représente la poste de Bohème et Moravie auprès de l’UPU. Au niveau interne, un « groupe Poste » était rattaché au « Protecteur du Reich ». Les tarifs intérieurs (Bohème et Reich inclus) sont ceux du Reich.

Les timbres de Tchécoslovaquie restent valables jusqu’au 15-12-39. Les timbres du Reich ont été tolérés conjointement à ceux de Bohême.

L’utilisation des cachets postaux est assez complexe. On trouve :

  • les anciens cachets tchèques unilingues, des anciens cachets autrichiens, des cachets bilingues tchèques – allemand (utilisés avant la guerre dans les zones de forte présence allemande), des cachets ambulants et ferroviaires :
  • à partir du 1er juillet 40, les nouveaux cachets du protectorat sont soit en allemand (dans les zones où réside une minorité allemande) et bilingue tchèque-allemand
  • des cachets mécaniques à slogan, généralement bilingue
Prague flamme pour le charbon
  • de juillet à fin 41, les cachets Viktoria (détournement du slogan de Churchill), à date ou non, sont apposés sur les courriers. Il existe de nombreux modèles, y compris la lettre V dans un cercle. Certains cachets étaient apposés par les administrations, et non par les postes. On trouve donc des cachets postaux (à date) et non postaux.
  • les cachets dits de libération, utilisés entre le 15 et le 25 mars 39 dans les zones de Bohême-Moravie où résidait une minorité allemande (apposés soit à la place, soit à côté des cachets oblitérants). Après la date du 25 mars, il s’agit d’oblitération de complaisance apposées sur leurs enveloppes ayant circulé. Mahrisch Ostra, outre les timbres ci-dessous, le bureau de la Feldpost a vendu des timbres avec ses propres surcharges, pas vraiment officielles (pas reconnues)
  • Cachets spéciaux. Il en existe environ 120. Leur but est généralement de diffuser des idées nationales-socialistes ou de renforcer le sentiment national tchèque, mais aussi de présenter un événement, commémorer un grand homme. Dans les zones ethniquement tchèques, ils peuvent être bicolores. A partir de 42, ces cachets sont en allemand seul.

Les étiquettes de recommandation bilingues apparaissent fin 39.

2 Poste allemande de service (Dienstpost)

Elle avait trois tâches :

  • Gestion du trafic de l’administration allemande et des usines d’armement (nombreuses dans l’ex Tchécoslovaquie)
  • Gestion du trafic privé des employés allemands de ces entités
  • Acheminement du courrier de la poste militaire de campagne (puis des SS à partir de 1940)

Le 9 mai 39, 11 premiers bureaux sont ouverts. Il fallait se déplacer dans un bureau (ou, plus tard, dans une agence officielle) pour déposer ou aller chercher son courrier (mais cette règle n’était pas toujours suivie, et du courrier officiel avec des cachets postaux de la poste de Bohème est fréquent). Le courrier officiel devait être affranchi de timbres allemands (mais on peut rencontrer des envois affranchis de timbres de la poste de service). Il y a eu jusqu’à 24 bureaux et 90 agences

A la différence d’autres régions (Est), il n’y a pas eu de cachets provisoires de la Dienspost lors de l’arrivée des allemands

Le cachet le plus fréquent est un cachet circulaire VILLE/ DATE/ DEUTSCHE DIENTSPOST BÖHMEN-MÄHREN, parfois accompagné d’une griffe linéaire, encadrée ou non, DURCH DEUTSCHE DIENSTPOST BÖHMEN-MÄHREN (police gothique ou romaine), et, si nécessaire, d’une étiquette de recommandation.

Le courrier de la Dienspost de Bohême n’était jamais revêtu de cachets commémoratifs.

3 Feldpost

En Bohème, c’est en mars et avril 39, une poste d’exercice (avec un numéro de secteur à 6 chiffres)  qui se charge du courrier des militaires. Le courrier des militaires vers l’arrière bénéficie de la franchise, mais celui pour les militaires était affranchi.

Quand la feldpost commence à remplacer la poste d’exercice, les secteurs postaux n’ont plus que 5 chiffres.

Dès le début, c’est la Dienstpost qui se charge du courrier destiné aux bureaux de collecte des soldats allemands. Mais, selon l’ouvrage de Schlutz (poste de service), une poste de campagne est recréée en 1945

Les plis de la poste de campagne étaient souvent oblitérés à l’aide d’un cachet circulaire DEUTSCHE REICHPOST, principalement à Prague.

4 Camps, ghetto

Terezin (Théresienstatd en tchèque) : Le « ghetto modèle » selon les allemands. Les premiers juifs arrivent en novembre 41. Le Judenrat (conseil juifs) a établit un système postal via les Judenrat de Prague et Berlin ou Bauschowitz (la ville la plus proche).

Il n’y avait pas de cachet postal Theresienstadt pour le ghetto (uniquement pour la « Kleine Festung » (prison de la gestapo à côté du ghetto). Les correspondances sont donc oblitérées d’une des 3 villes citées ci-dessus (avec, pour Berlin et Prague, un cachet du Judenrat en plus).

Les documents ci-dessous sont des scans du livre « das system des terror » ou des photos du musée de Terezin

Par contre, les cartes destinées au ghetto recevaient parfois un cachet d’arrivée rectangulaire, avec un cachet linéaire à date.

Des colis pouvaient être envoyés aux internés. Dans le colis, un avis de réception pouvait être retourné, après avoir été signé par le destinataire : ainsi, il prouvait qu’il était en vie ! L’expéditeur du colis devait coller un timbre (date d’émission du timbre : 10/7/43) sur le colis (ces timbres sont donc rares oblitérés). Lors de la visite de membres de la croix rouge en juin 44, un bloc souvenir de 4 timbres pour colis leur a été donné. Les timbres neufs que l’on trouve proviennent de stocks de timbres non utilisés (après la libération de la ville) en stock dans le Judenrat de Prague… et des bureaux du  commandement allemand du camp. Il existe de nombreux faux, réalisés en particulier à partir de plaques originales récupérées par un allemand travaillant à l’imprimerie des billes de Prague

Hagibor : camps spécial (sonderlager) pour les épouses de juifs. Pouvaient écrire sur des cartes, 32 mots

Wikipedia répertorie un camp d’internés (Ilag IV)  à Eisenberg (Jezeri en tchèque), qui aurait fonctionné en 1944 et remplacerait le camp d’Ulbersdorf (Alberchtice u Mostu en tchèque). Le catalogue des camps de Mattielo ne répertorie pas les éventuels cachets de ce camp.

Ci dessous la lettre d’un détenu tchèque au camp allemand de Sachsenhausen

Et la lettre postée depuis le camp de Buchenwald le 11/2/44. L’enveloppe est neutre, ce qui est souvent le cas des envois destinés à la Bohême

5 Censure

Dès avril 39, un contrôle des devises est mis en place à Prague et Brno. Il s’agit en fait d’une censure déguisée du courrier. Cachet B.K./PRAHA chiffre 1 à 7  et D.K./ Br 2 (D.K. signifiant Devisovou Kontrolou). Selon certaines sources, 11 localités ont utilisé des cachets circulaires D.K.

Et une bande bilingue français tchèque.

A partir du déclenchement de la guerre, une annexe du bureau de censure de l’OKW de Vienne aurait été ouverte à Prague (même lettre que le bureau de censure de Vienne, à savoir « g »). Cependant, la marque de contrôle de devises est parfois ajoutée à la marque de l’OKW.

Les lettres de/vers un autre pays ou territoire (y compris la Slovaquie) sont censurées (à Vienne, et peut-être à Prague par une annexe du bureau de censure de Vienne). Vers les Etats Unis, il est fréquent de rencontrer une censure anglaise.

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