Estonie: philatélie pendant la guerre

Plan

1 Contexte historique

2 Timbres période occupation soviétique 1940-41

3 Timbre période occupation allemande 1941-44

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1 Contexte historique

En vert foncé, les zones cédées à l’URSS en 1945

L’histoire de l’Estonie est très proche de celle des deux autres états baltes, à savoir la Lettonie et la Lituanie.

Le 28 septembre 1939, l’Estonie signe avec l’Union soviétique un traité d’assistance : les troupes russes s’installent progressivement dans le pays, le point culminant étant l’entrée de 90 000 soldats le 16 juin 1940, en raison de soi-disant incidents frontaliers. Suivent des élections truquées mi juillet, et le 6 août 1940 l’intégration de l’Estonie à l’Union soviétique. Les allemands résidant sur place (depuis des générations) doivent quitter le territoire pour la Pologne annexée par le Reich (environ 20 000 personnes). De leur côté, environ 8 000 suédois vivant en Estonie doivent quitter le pays (en 1943)

33 000 estoniens sont incorporés dans l’armée rouge peu avant l’invasion du pays par les troupes d’Hitler (du 7 juillet au 21 octobre 1941). Le 14 juin 41, plus de 10 000 estoniens sont déportés au goulag. 

L’Estonie, comme les autres ex pays Baltes et la Biélorussie est rattachée au Reichskommissariat Ostland suite à l’entrée des troupes allemandes en 1941.

Environ 500 estoniens rejoignent la Waffen SS, 6 000 autres rejoignent l’armée finlandaise (qui se bat contre les russes) et plusieurs milliers partent travailler en Allemagne.

En 1944, certains soldats estoniens qui combattaient aux côtés des allemands les suivent dans leur retraite (ils seront capturés en mai 45 par des partisans tchèques et soit fusillés, soit envoyés au goulag), d’autres restent sur place pour défendre en septembre 44 une éphémère Estonie indépendante (qui dura 1 ou  2 jours, avant l’arrivée des soviétiques à Tallinn) puis aidèrent des civils dans leur exode vers la Suède. Certains continueront à combattre les soviétiques jusqu’au milieu des années 50.

Quand, mi 44, les troupes russes approchent, 70 000 estoniens se battent aux côtés des allemands. Mais Tallinn tombe le 22 septembre 1944. L’Estonie est à nouveau soviétique. 80 000 estoniens fuient alors le pays (vers la Suède, l’Allemagne…). La Russie retire à l’Estonie 5% de son territoire d’avant guerre (Narva, Petchory- Petseri en estonien et allemand).

Lors de l’avancée des troupes soviétiques en 1944, environ 20 000 estoniens fuient vers la Suède, tandis que 30 à 40 000 fuient vers l’Allemagne (où beaucoup se retrouvèrent dans des DP camps).

En 1939, il y avait 1 120 000 habitants en Estonie, et seulement 850 000 fin 1945

2 Timbres période occupation soviétique juin 1940 à juillet 1941

Les changements de régimes (et d’occupant) entrainent des changements de monnaie. En aout 1940 (annexion à l’Union Soviétique), le rouble entre en circulation, conjointement à l’ancienne monnaie locale (Kroon). A partir de mars 41, seul le rouble a cours légal. Suite à l’occupation allemande, le Mark est introduit à l’automne 41 (mais le rouble continue à être utilisé !). En 1944, avec le retour des soviétiques, le rouble redevient la seule monnaie légale.

Dirigeant avant l’occupation soviétique :

Konstantin Päts : Michel n° 113 à 119, 124 à 126 et 146 à 147 (Yvert n° 136 à 145A). Se fait élire président en 1938, est arrêté par les soviétiques le 30 juillet 40 et est déporté.

Période soviétique :

Les timbres soviétiques doivent être utilisés. Cependant, du 21 juin 1940 au 31 janvier 1941, les timbres estoniens continuent à être utilisable (série Caritas, blasons et centenaire du timbre; Seuls les timbres à l’effigie de Päts sont interdits), d’où des affranchissements mixtes. On trouve aussi des affranchissements en numéraire en juillet-septembre 40 et des affranchissements mixtes (timbres estoniens et timbres russes) jusqu’à mi 41, bien que théoriquement seuls les timbres soviétiques doivent être utilisés à partir du 1er février 1941 (d’autres sources indiquent que les timbres estoniens ont été utilisés jusqu’à l’invasion allemande en juillet 41).

  • 30 juillet 1940    : Michel n° 160-163 (Yvert n° 175 à 178) Timbre commémorant le centenaire du timbre, émis alors que l’Estonie est sous contrôle des  soviétiques. Tirage entre 4,80 et 0,48 Mi. Théoriquement utilisables jusqu’au 30 janvier 41. Mais on trouve des enveloppes ayant régulièrement circulé jusqu’en juin 41.
  • 15 aout 1940      : Michel n° 164 (Yvert n° 97a) Retirage du Yvert n° 97 (et Michel N) 74) sur papier épais. Tirage 321 461

3 Timbre période occupation allemande 1941-44

(source catalogue Michel, Estonia postal history Hurt & Ojaste ET site filateelia.ee)

Fonctionnement de la poste en Estonie pendant l’occupation allemande.

  • Période 1 (juillet à septembre 1941). L’occupation par les troupes allemandes commence (sud du pays) en juillet 1941, pour se terminer en septembre 1941 (occupation des iles estoniennes). Trafic postal local uniquement, paiement en roubles, utilisation de timbres locaux (généralement reconnues à postériori par la poste centrale de Tallinn) ou paiement en espèce au comptoir (affranchissement en numéraire). Le catalogue Michel répertorie des émissions locales (et précise qu’il existe de nombreuses surcharges et/ou les oblitérations fausses) à Elva, Hummuli, Moisekull, Noo, Otepää, Pärnu, Puka et Rakvere :

Eliva                     : Ville située au sud-est de Dorpat (maintenant Tartu, en estonien). Selon Michel, environ 60 modèles de timbres russes ont été surchargés manuellement « Eesti Post » le 10 juillet 1941 (entre 50 et 600 ex de chaque). Ils ont été vendus jusqu’au 12 aout et utilisés jusqu’au 15 aout 41. Les surcharges ont été réalisées par le responsable de la poste d’Elva, avec l’accord du chef de la milice locale, dans un souci politique (comme les timbres de la libération en France !). Les variétés de surcharge (et la surcharge sur les timbres estoniens) ont été faites à la demande des philatélistes. Les spécialistes distinguent 4 situations différentes : une liste (transmise à la GPO) de timbres surchargés légalement (35), ceux aussi vendus surchargés à la poste mais non inclus dans la liste d’origine (une dizaine), des timbres apportés par des particuliers à la poste pour être surchargés (une soixantaine) et enfin les « variétés » de surcharge. Des entiers ont aussi été surchargés. Il existe de nombreux faux.

Michel, dans son catalogue des entiers, cite 3 modèles d’enveloppes et 4 de cartes postales surchargées. La côte varie de 600 à 4000 euros !

Hummuli             : Bourgade située au sud-est du pays, près de la frontière lettonne. Les surcharges n’ont pas été reconnues par les autorités estoniennes.

Moiseküll            : Le nom actuel est Moiseküla, au sud du pays, sur la frontière lettonne. Le 4 août 41, 6 timbres russes et 1 timbre estonien ont été surchargés « Vaba Eesti », soit Estonie libre (25 à 1000 pièces de chaque, et au total 2 705 timbres). La surcharge a été autorisée par le commandant local de la « home guard estonienne ». Utilisables jusqu’au 16 aout 41. Très nombreux faux (surcharge, oblitération d’Abja entre autre). Les timbres ont été principalement vendus à Moiseküla et Abja, et les timbres se rencontrent oblitérés à Uue-Kariste, Pärnu et Moiseküla.

Noo                     : Petite bourgade située entre Tartu et Elva (le nom allemand est Nüggen) 5 timbres russes ont été surchargés de manière manuscrite, en Juillet 1941

Otepää                : Bourgade située au sud d’Elva. Le nom allemand est Odenpäh. 2 timbres ont été émis par la mairie le 22 juillet 1941 (blason). Il existe plusieurs versions (perforé, non perforé, forme arrondie ou pointue du blason). 2 100 ex du premier (20 + 20 K), 5 000 du deuxième (30 + 30 K). Utilisables jusqu’au 15 aout 1941. Certains timbres ont été vendus officiellement, d’autres (certains non dentelés, les variétés) ont été vendus directement par l’imprimeur aux philatélistes. Utilisables jusqu’au 15 aout 41

Pärnu                  :  Nom allemand Pernau. Ville située sur la côte ouest du pays. 10 timbres russes différents ont été surchargés Pernau 8 VII 1941 (c’est la date de l’entrée des troupes allemandes). Deux versions : la première (surcharge Pernau 8. VII 1941) a été émise le 16 aout 41 (seulement 6 timbres) avec l’autorisation des autorités militaires allemandes, la 2ème version (V11 au lieu de VII) le 14 septembre, à la demande de la poste de Tallinn afin d’éviter la spéculation. Cette 2ème version n’existe pas oblitéré (sauf CTO), car, bien qu’ayant été vendue aux guichets, elle n’a pas eu de validité postale, son émission ayant eu lieu après la fin de la date d’utilisation possible de cette série (25 aout). Tirage 1ère version : entre 800 et 30 000, tandis que la 2ème version a eu un tirage plus important (entre 12 000 et 204 000 ex)

Puka                     : Petite bourgade située au sud d’Elva.(nom allemand : Bockenhof). La surcharge sur 2 timbres soviétiques (Puka  9 Juul 1941) n’a pas été reconnue

Rakvere               : Le nom allemand de cette ville située au nord de l’Estonie est Wesenberg. La surcharge (RAKVERE / ESTLAND  7 VII 41) n’est pas officielle.

 

  • A partir de d’aout 41 : Tallinn est occupé par les allemands. La poste principale reprend en main le trafic postal. Le paiement se fait toujours en rouble (dans un premier temps). Apparaissent alors des émissions « locales » utilisables dans tout le pays. Avant l’utilisation des timbres allemands surchargés « ostland » (le 4 novembre 1941), les deux séries ci-dessous sont émises et vendues à Tartu (nom allemand : Dorpat) – la poste ayant ré-ouvert le 26 juillet 41. Elles sont progressivement mises en vente dans tout le pays. Leur vente cesse décembre 41, mais ont pu être utilisées jusqu’au 31 mars 42 pour les envois vers le territoire de l’Ostland (courrier domestique) et 30 avril 1942 pour l’usage vers l’extérieur.
  • 7-12 aout 1941      : Michel n° 1 à 3 (Yvert n° 1 à 3). 2 versions existent : papier épais (émission du 7 aout) et normal (le 12 aout) Les non dentelés ont été émis le 11 septembre. Émission autorisée par les autorités allemandes. Tirage de la 1ère version : 100 000, 250 000 et 250 000 et de la 2ème version : 200 000, 250 000 et 250 000 (les ND ont été imprimés en 3 500 ex., dont 3 000 récupérés par l’officier allemand en charge de la supervision de l’impression !)
Estonie allemande n° 1 à 3
  • 22 septembre 1941 : Michel 4 à 9 (Yvert 4 à 9) Série au profit de la reconstruction : 2 tirages existent : papier blanc, épais pour le 1er, papier grisâtre pour le 2ème, ce deuxième tirage ne concerne que les trois premières valeurs. De plus, la 1ère impression présente un burelage de sécurité lilas gris, et la 2ème brun-jaunâtre. Tirage environ 1 Mi de chaque pour le 1er tirage, et 2 Mi pour le second. Les timbres non vendus au comptoir des postes estoniennes ont été expédiés en Allemagne pour être mis en vente au public. Les non dentelés du premier tirage (tirage 15 000) ont été régulièrement mis en vente aux guichets de la poste. A ne pas confondre avec les ND de la seconde impression !
  • 4 novembre 41         : Michel n° 1 à 20 (Yvert n° 21 à 38) Timbres Hitler surchargés Ostland (donc utilisables dans tous les ex-états baltes, en Biélorussie). Mais les timbres allemands non surchargés sont aussi utilisés. Voir les timbres « OSTLAND« 

 

exemple de timbres allemands surchargés "Ostland", utilisés dans les ex Etats baltes et en Biélorussie
exemple de timbres allemands surchargés « Ostland », utilisés dans les ex Etats baltes et en Biélorussie

 

Affranchissements mixtes : on trouve des affranchissements timbres estoniens + timbres allemands, timbres estoniens + timbres Ostland, timbres allemands + timbres Ostland.

  • Le 24 avril 42, le DPO (Deutsche Post Ostland) commence son activité. Elle est en charge du service postal estonien et du courrier allemand (courrier officiel de la Dienspost et de celui des civils allemands), hors poste militaire. Son activité prend fin en aout 44, lors de l’arrivée des troupes russes. Les timbres russes sont alors utilisés.

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